Lorsque plusieurs créanciers peuvent exiger d’un débiteur l’exécution d’une même obligation:
a) les créances sont séparées lorsque chaque créancier peut seulement exiger sa part;
b) les créances sont solidaires lorsque chaque créancier peut exiger l’ensemble de la prestation;
c) les créances sont communes lorsque tous les créanciers sont tenus d’exiger ensemble la prestation.
COMMENTAIRE
1. Plusieurs créanciers
La pluralité de créanciers se présente dans des différentes situations.
Illustration
1. Les banques A, B et C souscrivent un contrat de prêt syndiqué de 12.000.000 USD au profit de la société X. Les trois banques sont cocréancières de l’obligation de remboursement de X.
D’autres exemples de pluralité de créanciers se présentent, notamment, avec les coassureurs, les acheteurs et/ou vendeurs multiples dans des accords de prise de participation, ou entre partenaires à des accords de consortium dans différents secteurs, tels que le secteur de la construction ou l’industrie pétrolière.
2. La même obligation
La présente Section s’applique seulement si les différents créanciers peuvent réclamer l’exécution de la même obligation de la part du débiteur. C’est le cas dans l’Illustration 1 (remboursement du prêt syndiqué). Les situations où différents créanciers du même débiteur ont des droits dérivant d’obligations différentes ne relèvent pas de la présente Section.
Illustration
2. L’architecte A et l’entrepreneur B participent tous deux à la construction d’une nouvelle installation industrielle. Leurs droits respectifs envers le client portent sur différentes obligations (paiement de leurs services respectifs). Leurs droits ne sont pas soumis aux articles de la présente Section, mais aux dispositions légales correspondantes applicables.
En revanche, lorsque différents participants dans un projet de construction se rassemblent en consortium et réclament un paiement unique pour l’ensemble de leurs services, ils doivent être considérés comme formant une pluralité de créanciers aux fins de ce paiement.
La “même obligation” provient habituellement d’un même contrat. Dans l’Illustration 1, l’accord de prêt syndiqué est renfermé dans un contrat unique. Toutefois, il pourrait aussi se faire que, dans la même situation, chaque prêteur choisisse d’avoir son propre contrat avec l’emprunteur. Les coassureurs qui couvrent ensemble le même risque ont habituellement des relations contractuelles séparées avec l’assuré.
Illustration
3. Huit compagnies d’assurances conviennent de coassurer les risques de responsabilité d’un groupe pharmaceutique. L’accord de coassurance prévoit que chaque coassureur a une relation contractuelle distincte avec l’assuré, mais que les obligations de l’assuré envers les coassureurs sont les mêmes (paiement de la prime convenue, mesures de précaution exigées, notification du dommage, etc.). Les coassureurs forment une pluralité de créanciers, soumis aux articles de la présente Section.
3. Trois principaux types
L’article 11.2.1 définit les trois principaux types de créances existant en pratique, lorsque plusieurs créanciers peuvent exiger l’exécution de la même obligation d’un débiteur.
Les créances peuvent être séparées. Chaque créancier peut alors seulement exiger sa part. Illustration
4. Les faits sont les mêmes que dans l’Illustration 1. Si les créances des banques A, B et C envers X s’élevant à un montant total de 12.000.000 USD sont séparées et si leurs parts sont égales, chaque banque pourra seulement exiger de X le remboursement de 4.000.000 USD.
Les créances peuvent être solidaires, ce qui signifie que chaque créancier peut exiger l’ensemble de la prestation (voir l’article 11.2.2), sous réserve d’une répartition ultérieure entre les différents créanciers (voir l’article 11.2.4).
Illustration
5. Les sociétés A et B sont copropriétaires d’un entrepôt qu’elles louent à la société de transport X. Le contrat prévoit que les copropriétaires ont solidairement droit aux loyers. A et B peuvent chacune exiger de X le paiement de la totalité du prix du loyer.
Les créances sont communes lorsque que les créanciers sont tenus de réclamer ensemble la prestation; ainsi, le débiteur ne peut exécuter qu’en faveur de l’ensemble des créanciers.
Illustration
6. Les sociétés A et B ont pris ensemble en location des bureaux qu’elles partagent dans une capitale étrangère. Compte tenu de la nature de leur droit à l’utilisation des bureaux, A et B sont des créanciers communs. Cela n’empêcherait pas que l’une des sociétés soit désignée comme représentante pour traiter avec le propriétaire des bureaux.
4. Absence de présomption
En cas de pluralité de débiteurs, l’article 11.1.2 établit une présomption de solidarité des obligations, ce qui correspond à la pratique commerciale la plus répandue.
En revanche, pour ce qui est de déterminer auquel des trois types définis dans cet article appartiennent les créances d’une pluralité de créanciers, les Principes n’établissent aucune présomption. La raison en est qu’aucun de ces types ne semble prévaloir en pratique; les choix varient beaucoup, principalement en fonction des opérations concernées.
En conséquence, dans des situations impliquant une pluralité de créanciers, les parties sont encouragées à choisir le type pertinent d’obligations par une stipulation expresse.
Illustrations
7. Les banques A, B et C concluent un contrat de prêt syndiqué en vue d’accorder un financement à la société X. Le contrat prévoit que ”Toutes les sommes et obligations dues à chacune des Banques forment des obligations distinctes et indépendantes. Chacune des Banques peut exécuter séparément ses droits en vertu du présent contrat”. Cette disposition expresse a pour effet de rendre séparées les créances des Banques.
8. Les collectionneurs d’art A et B, copropriétaires d’un tableau de Rothko, vendent celui-ci à un musée au prix de 20.000.000 USD. Le contrat prévoit que chaque vendeur peut exiger le paiement de la totalité du prix. Les créances sont solidaires.
9. Les faits sont les mêmes que dans l’Illustration 8 mais ici le contrat de vente avec le musée prévoit que les créances de A et B sont séparées. Cela signifie que chacun d’eux ne peut exiger le paiement du prix qu’à hauteur de sa propre part de la créance, correspondant normalement à sa part précédente de propriété.
Avant d’effectuer un tel choix contractuel, les parties doivent être attentives aux avantages et inconvénients afférents aux différents types de pluralité de créances.
En particulier, les créances solidaires ont l’avantage d’éviter la multiplication des actions en justice. Cela est une considération particulièrement importante dans le commerce international. Chacun des créanciers peut exiger la totalité de la prestation. Les créances solidaires simplifient également la situation du débiteur, qui n’aura pas à diviser sa prestation entre les différents créanciers. Du point de vue des différents créanciers eux-mêmes, les recours sont normalement plus aisés lorsqu’ils sont solidaires.
D’un autre côté, les créanciers doivent savoir que si leurs créances sont solidaires, ils perdent le contrôle exclusif sur leurs parts respectives. Tout créancier solidaire peut exiger et recouvrer l’ensemble de la prestation, avec le risque qu’une répartition ultérieure conformément à l’article 11.2.5 suscite des difficultés. Cela explique pourquoi les créances séparées semblent prévaloir dans certains secteurs (voir, par exemple, l’Illustration 1).
Si les parties n’ont pas effectué de choix contractuel exprès, en cas de pluralité de créanciers, le type auquel se rattachent les créances devra être déterminé en interprétant le contrat, conformément aux dispositions du Chapitre 4. Dans de nombreux cas, des circonstances telles que la nature ou l’objet du contrat seront particulièrement pertinentes (voir l’article 4.3(d)).
Illustrations
10. La société A, située dans le pays X, et la société B, située dans le pays Y, se groupent pour commander une grande quantité de voitures à un constructeur. Les voitures pour le pays X ont la conduite à droite, tandis que celle pour le pays Y ont la conduite à gauche. Ces circonstances indiquent que, lorsque la livraison est réclamée, A et B sont des créanciers séparés, chacun d’eux étant en droit d’exiger sa propre catégorie de voitures.
11. Le consultant X s’est engagé à fournir des services de conseil fiscal aux sociétés A et B concernant les opérations qu’elles réalisent ensemble dans le cadre d’une “joint venture”. Etant donné que les conseils fiscaux portent sur des opérations réalisées conjointement par A et B et que ces conseils ne sont pas divisibles, A et B doivent être considérées comme des créanciers solidaires lorsqu’elles exigent l’exécution de la part de X.
5. Désignation éventuelle d’un représentant
Dans la pratique, en cas de pluralité de créanciers, ceux-ci désignent souvent un représentant habilité à traiter avec le débiteur au nom de l’ensemble des créanciers, dans les limites convenues. Cela semble particulièrement fréquent, pour des raisons pratiques, lorsque les créances sont séparées. Dans un tel cas, toutefois, chaque créancier entend conserver le plein contrôle de ses droits, en se réservant souvent la possibilité de révoquer le pouvoir du représentant à tout moment.
Illustration
12. Les banques A, B et C ont conclu ensemble un accord de prêt syndiqué visant à prêter 12.000.000 USD à la société X. Les créances sont séparées, 4.000.000 USD pour chacune des banques. Toutefois, A a été désignée comme représentante du consortium ayant pouvoir pour recouvrer le remboursement de la totalité du prêt.
L’initiative de désigner un intermédiaire peut venir du débiteur qui souhaite exercer un certain contrôle sur les créances susceptibles d’être exercées séparément par ses nombreux créanciers.
Illustration
13. Conformément aux termes d’une émission d’obligations au porteur, un “trustee” est désigné pour représenter les intérêts des obligataires. L’émetteur s’engage à payer chaque obligataire conformément aux termes de l’émission et reconnaît au “trustee” un droit parallèle au paiement. En cas de défaillance de l’émetteur, le “trustee” a le pouvoir de poursuivre le paiement de sa propre initiative et est tenu de le faire si une certaine part en valeur des obligataires le lui demande. Les obligataires ne peuvent pas agir individuellement à l’encontre de l’émetteur en cas de défaillance de celui-ci, à moins que le “trustee” n’ait pas accompli son obligation de poursuivre l’exécution en vertu du pouvoir qui lui est conféré. Chaque obligataire est un créancier séparé. L’objet du trust est seulement d’assurer le suivi de l’exécution par l’émetteur et de coordonner l’action à l’encontre de celui-ci, afin d’éviter des initiatives individuelles précipitées de la part des obligataires.
L’exécution totale en faveur de l’un des créanciers solidaires libère le débiteur envers les autres créanciers.
COMMENTAIRE
1. Chaque créancier peut exiger l’exécution totale
Le principal effet des créances solidaires a déjà été énoncé dans la définition contenue à l’article 11.2.1(2). Lorsque les créances sont solidaires, chaque créancier peut exiger l’exécution totale de la part du débiteur.
Illustration
1. Les copropriétaires A et B ont vendu leur hôtel à l’acheteur X au prix de 5.000.000 EUR. Leurs parts de copropriété sont égales. Le contrat de vente prévoit que les créances des vendeurs concernant le paiement du prix sont solidaires. A peut exiger 5.000.000 EUR à X, sous réserve d’une répartition ultérieure en vertu de l’article 11.2.4.
2. Choix du débiteur
Cet article énonce deux autres effets importants des créances solidaires.
Premièrement, si le débiteur prend l’initiative d’exécuter spontanément son obligation, il est autorisé à s’exécuter en faveur de n’importe lequel de ses créanciers.
Illustration
2. Les faits sont les mêmes que dans l’Illustration 1. X prend l’initiative de payer le prix avant d’avoir été invité à le faire par l’un ou l’autre de ses créanciers. X peut valablement payer A ou B.
3. Libération du débiteur
Un autre effet important des créances solidaires est que le débiteur qui a exécuté la totalité de la prestation en faveur de l’un de ses créanciers est libéré à l’égard des autres créanciers.
Illustration
3. Les faits sont les mêmes que dans l’Illustration 1. X a payé la totalité du prix de 5.000.000 EUR à A. B, ayant des difficultés à recouvrer sa part auprès de A, exige de X le paiement de 2.500.000 EUR. En vertu de l’article 11.2.2(2), la demande sera rejetée parce que l’entier paiement effectué à A a libéré X à l’égard de l’autre créancier.
4. Aspects pratiques
Le droit donné à chacun des créanciers solidaires de demander la totalité de l’exécution peut requérir une certaine coordination, afin d’éviter la duplication des initiatives et des coûts inutiles.
Les créanciers pourront s’entendre à l’avance sur celui parmi eux qui demandera l’exécution, ou convenir au moins que le créancier qui envisage de prendre l’initiative devra consulter ses cocréanciers.
D’un autre côté, lorsque c’est le débiteur qui prend l’initiative, son choix du créancier à l’égard duquel il décide de s’exécuter peut être affecté par le fait qu’un autre créancier a déjà réclamé l’exécution. Certaines consultations préalables peuvent alors être appropriées. En outre, le créancier qui a reçu le paiement devrait immédiatement informer les autres créanciers que le paiement est intervenu. Ces solutions devraient utilement être convenues à l’avance par toutes les parties intéressées. En tout état de cause, les dispositions en matière de bonne foi sont toujours d’application (article 1.7).
1) Le débiteur peut invoquer envers tout créancier solidaire tous moyens de défense et exercer tous droits de compensation qui sont personnels à sa relation avec ce créancier ou qu’il peut invoquer envers tous les créanciers, mais il ne peut ni invoquer les moyens de défense ni exercer les droits de compensation qui sont personnels à sa relation avec un ou plusieurs des autres créanciers.
2) Les dispositions des articles 11.1.5, 11.1.6, 11.1.7 et 11.1.8 s’appliquent aux créances solidaires, avec les adaptations nécessaires.
COMMENTAIRE
1. Possibilité d’invoquer des moyens de défense
Les moyens de défense pouvant permettre à un débiteur de refuser d’exécuter n’existent pas nécessairement à l’encontre de tous les créanciers. Certains moyens de défense peuvent être de nature personnelle dans la relation entre le débiteur et l’un seulement des créanciers. Ces moyens de défense ne peuvent être invoqués qu’à l’encontre du créancier concerné.
Illustration
1. Un producteur de céréales X est convenu de fournir une certaine quantité de semences de blé aux sociétés A, B et C, engagées dans un projet agricole commun dans un pays en développement. Le contrat prévoit que A, B et C sont des créanciers solidaires pour ce qui concerne la livraison. X découvre que les locaux dans lesquels il doit livrer les semences ne sont pas dotés des installations appropriées pour un déchargement adéquat, alors qu’il avait été assuré par A seulement qu’elles seraient disponibles. X peut invoquer cet argument comme moyen de défense à l’encontre de A qui exigerait la livraison, mais non à l’encontre de B et C qui n’avaient pas garanti que les locaux disposeraient des installations appropriées pour la livraison.
Le débiteur peut également invoquer des moyens de défense dont il dispose collectivement à l’encontre de tous les créanciers.
Illustration
2. Les faits sont les mêmes que dans l’Illustration 1. X apprend que le projet agricole fait appel à une main-d’œuvre infantile par A, B et C, en violation des règles impératives applicables. C’est là un moyen de défense commun que X peut invoquer à l’encontre de n’importe lequel des créanciers exigeant la livraison des semences de blé.
2. Effets de certains moyens de défense
La Section 1 contient des règles particulières concernant les effets de certains types de moyens de défense (voir les articles 11.1.5, 11.1.6, 11.1.7 et 11.1.8) que peuvent invoquer les débiteurs solidaires. Le paragraphe 3 de cet article prévoit que ces règles s’appliquent, avec les adaptations nécessaires, aux créances solidaires.
a. Exécution et compensation (référence à l’article 11.1.5)
L’article 11.1.5 dispose que “L’exécution ou la compensation de l’obligation par un débiteur solidaire, ou la compensation exercée par le créancier envers un débiteur solidaire, libère les autres coobligés à l’égard du créancier, dans la mesure de l’exécution ou de la compensation”. De la même façon, l’exécution reçue (ou la compensation exercée) par l’un des créanciers solidaires libère le débiteur à l’égard des autres créanciers, dans la mesure de l’exécution ou de la compensation.
Illustrations
3. Les sociétés A, B et C ont consenti solidairement un prêt de 300.000 EUR à X. A reçoit la totalité du paiement. Si B ou C exigent à leur tour le remboursement, X peut invoquer qu’il a déjà exécuté la totalité de l’obligation auprès de A.
4. Les faits sont les mêmes que dans l’Illustration 3, mais ici X peut réclamer 300.000 EUR à A pour la vente de matériel de bureau. X exerce son droit de compensation en vertu de l’article 8.3. Son obligation en vertu du contrat de prêt est éteinte non seulement envers A, mais également envers B et C.
b. Remise de dette et transaction (référence à l’article 11.1.6)
L’article 11.1.6 dispose que “La remise de dette accordée à un débiteur solidaire, ou la transaction avec un débiteur solidaire, libère tous les autres débiteurs de la part du débiteur concerné, à moins que les circonstances n’indiquent le contraire”. De la même façon, la remise de dette accordée au débiteur par l’un des créanciers (ou la transaction avec le débiteur par l’un des créanciers) libère le débiteur à l’égard des autres créanciers dans la mesure de la remise de dette ou de la transaction.
Illustrations
5. Pamela, cheval de course réputé, a été vendu par ses copropriétaires A et B à l’acheteur X. Pour ce qui est du paiement du prix, le contrat prévoit que A et B sont créanciers solidaires. Si A accorde une remise de dette à X portant sur la part de A de l’obligation de X, la créance de B envers X est réduite du montant de la remise de dette de la part de A. A n’a pas de recours contributoire à l’encontre de B en vertu de l’article 11.2.4 ci-dessous (voir l’article 11.1.6(2)).
6. Les faits sont les mêmes que dans l’Illustration 3 mais A, dont la part du prêt est de 100.000 EUR, conclut une transaction avec X, acceptant un paiement de 60.000 EUR, soit un montant inférieur à sa part. Les créances solidaires de B et C à l’encontre de X sont réduites de tout le montant de la part de A, à savoir de 100.000 EUR; B et C restent tous deux créanciers solidaires de X pour la somme de 200.000 EUR. A, qui a conclu la transaction, n’a plus de recours en vertu de l’article 11.2.4 à l’encontre de B ou C (voir l’article 11.1.6(2)).
De même que dans l’article 11.1.6, avec les adaptations nécessaires, la référence à la transaction concerne le cas particulier où une transaction intervient séparément entre le débiteur et l’un des créanciers solidaires, portant sur la part de ce dernier. Dans ce cas, la question à résoudre est celle des conséquences d’une telle transaction sur les créances des autres créanciers.
Dans la situation la plus fréquente où la transaction concerne l’ensemble des créances solidaires, les conséquences sur les créances des différents créanciers sont déterminées par les termes de la transaction convenue par toutes les parties, et les recours contributoires sont établis en conséquence.
c. Expiration du délai de prescription (référence à l’article 11.1.7)
L’article 11.1.7 dispose que l’expiration du délai de prescription des droits du créancier envers un débiteur solidaire n’affecte ni (a) les obligations envers le créancier des autres débiteurs solidaires, ni (b) les droits de recours entre les débiteurs solidaires prévus à l’article 11.1.10. De la même façon, l’expiration du délai de prescription des droits de l’un des créanciers envers le débiteur n’affecte ni (a) les obligations du débiteur envers les autres créanciers solidaires, ni (b) les droits de recours entre les créanciers solidaires prévus à l’article 11.2.4.
Illustration
7. Le débiteur X a trois créanciers solidaires, A, B et C. La créance de A à l’encontre de X est prescrite. Cela n’affecte pas les créances de B et C à l’encontre de X. Si B ou C reçoit l’exécution de X, A peut exiger sa part auprès du créancier qui a reçu le paiement.
L’article 11.1.7 dispose également que si le créancier intente une procédure contre un débiteur solidaire dans le cadre des articles 10.5, 10.6 ou 10.7, le cours de la prescription est également suspendu à l’égard des autres débiteurs solidaires. De la même façon, si l’un des créanciers intente une procédure contre le débiteur, le cours de la prescription est également suspendu à l’égard des autres créanciers solidaires.
d. Effets des jugements (référence à l’article 11.1.8)
L’article 11.1.8 dispose qu’une décision rendue par un tribunal concernant la responsabilité envers le créancier d’un débiteur solidaire n’affecte ni (a) les obligations envers le créancier des autres débiteurs solidaires; ni (b) les droits de recours entre les débiteurs solidaires prévus à l’article 11.1.10. De la même façon, une décision rendue par un tribunal concernant la responsabilité du débiteur envers l’un des créanciers solidaires n’affecte ni (a) les obligations du débiteur envers les autres créanciers solidaires, ni (b) les droits de recours entre les créanciers solidaires prévus à l’article 11.2.4.
Illustration
8. Le débiteur X a trois créanciers solidaires, A, B et C. A intente seul une action en exécution contre X; le jugement accorde satisfaction à A seulement pour une partie de sa demande. Un tel jugement n’affecte pas les obligations de X envers B ou C, non plus que les recours entre les cocréanciers en vertu de l’article 11.2.4.
Toutefois, l’article 11.1.8(2) dispose également que les autres débiteurs solidaires peuvent eux-mêmes se prévaloir d’une telle décision, sauf si elle était basée sur des motifs personnels au débiteur concerné. En ce cas, les droits de recours entre les débiteurs solidaires prévus à l’article 11.1.10 sont affectés en conséquence. De la même façon, les autres créanciers solidaires peuvent se prévaloir de la décision s’ils l’estiment dans leur intérêt, sauf si elle était basée sur des motifs personnels au créancier concerné.
Illustration
9. Les faits sont les mêmes que dans l’Illustration 8. Cette fois cependant, le jugement donne pleine satisfaction à A, y compris l’octroi en sus de dommages-intérêts. Les autres créanciers peuvent aussi se prévaloir de cette décision favorable.
1) Dans leurs rapports entre eux, les créanciers solidaires ont droit à des parts égales, à moins que les circonstances n’indiquent le contraire.
2) Le créancier qui a reçu plus que sa part doit transmettre l’excédent aux autres créanciers, dans la mesure de leurs parts respectives.
COMMENTAIRE
1. Présomption d’égalité des parts
Les créanciers solidaires peuvent chacun exiger l’exécution de l’ensemble de la prestation conformément à l’article 11.2.2. Toutefois, entre eux, ils n’ont droit qu’à leurs parts respectives. Ces parts sont présumées égales.
Illustration
1. Les copropriétaires A et B ont vendu leur usine pour un montant de 10.000.000 SFR et sont créanciers solidaires pour le paiement du prix. Toutefois, lorsque l’acheteur aura payé les 10.000.000 SFR, chacun des copropriétaires aura le droit de recevoir sa part dans la répartition finale. En principe, les parts sont considérées égales. Chaque copropriétaire devra recevoir 5.000.000 SFR.
Toutefois, les circonstances peuvent indiquer une solution différente.
Illustration
2. Les faits sont les mêmes que dans l’Illustration 1, mais ici les parts de copropriété de l’usine n’étaient pas égales, A détenant 75% et B 25%. Cela indiquera que A devrait recevoir 7.500.000 SFR et B 2.500.000 SFR.
2. Transfert de l’excédent reçu
Il arrivera souvent que le cocréancier qui exige le paiement reçoive plus que sa part, puisqu’il a droit à l’exécution de l’ensemble de la prestation en vertu de l’article 11.2.2. Lorsqu’un créancier a reçu plus que sa part, il doit transmettre l’excédent aux autres créanciers dans la mesure de leurs parts respectives.
Illustration
3. Les faits sont les mêmes que dans l’Illustration 1. A a reçu paiement de la totalité du prix de l’usine, à savoir 10.000.000 SFR, et sa part de copropriété était de 50%. A doit transférer 5.000.000 SFR à B.
La question de savoir si la créance des autres créanciers portant sur l’excédent est un droit réel ou simplement un droit personnel à l’encontre du créancier qui a reçu plus que sa part ne relève pas du champ des Principes.